Ce qu'il en reste

Des années de guerre après, on en est là.
Un nouveau corps.
Plus une seule cellule en commun avec celui qu'on a traumatisé à ce point là.

Des mains qui tremblent. Ce qu'il en reste.
L'angoisse qui grimpe six paliers avant chaque rendez-vous médical.
Et vous faites du sport ?
Bon, montez sur la balance.

Des mois sans doigts dans la gorge, sans crises, sans larmes, des mois de photos et d'amour et de douceur.
Ce qu'il en reste.
L'urgence qui sert le ventre et la sensation du corps qui s'étale, qui gonfle, qui écrase, qui rempli toute la pièce à la moindre question qui approche le sujet.
Même si tout va bien.
Même si c'est la routine.
La honte de n'être pas déconstruit envers soi-même, la honte de se rassurer en se disant qu'au moins on rentre dans la grille des standards.
La honte et la colère.

Les souvenirs des os qui effleurent, affleurent, le souvenirs des ancres auxquelles se raccrocher, de la minceur maladive...
Ce qu'il m'en reste.
Des souvenirs enfouit sous des couvercles lourds de déni.
Prêts à exploser.
Et il faut
Tenir bon
Les bras tendu
Repousser au loin
Ce qu'il en reste
Embrasser ce qui s'est créé
Ce qui est né de ce qui était mort
Ne pas oublier
Ce qu'il en reste ne doit pas gagner.

Même si parfois les ongles se plantent prêt à déchirer
Les doigts au bord des lèvres
Les larmes au bord des yeux
Le chiffre inacceptable qui te fixe moqueur
Contenir la haine
Ton corps n'est pas l'ennemi
Ton corps n'est plus l'ennemi
L'ennemi c'est les autres
Tu n'as rien fait de mal.

Commentaires

  1. Tu as une écriture qui traverse férocement.. je me souviens, tu sais. De ce que j'ai traversé. De ces mots qui ont été mien.
    De la douceur sur toi..

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